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Depuis les années 1970 des courants théoriques de l’économie organisationnelle proposent de nouvelles grilles de lecture de la firme capitaliste. Ils admettent la nécessité de rompre avec la représentation de la firme de la microéconomie standard et de reconnaître à la firme sa réalité d’organisme complexe original. Cette nécessité admise la théorie de la firme est confrontée à deux questions fondamentales :
A la première question deux réponses sont proposées : - d’un côté la firme s’explique par les défaillances du marché [cette vision est centrée, dans la lignée néo-classique, sur une économie de l’échange, la firme se caractérisant comme un mode particulier d’allocation], - d’un autre côté la firme est vue comme un espace de production et un lieu de création de richesse et d’innovation [cette vision subit les influences de Marx, de Schumpeter et de Chandler]. A la deuxième question deux dimensions de la firme peuvent être mises en évidence, - d’un côté la firme (organisation) est envisagée comme lieu de coordination d’agents, [la firme organisation trouve son origine avec H.A. Simon et les de March : « Les organisations sont des systèmes d’actions coordonnées entre individus et groupes dont les préférences, l’information, les intérêts et les savoirs différent. Les théories de l’organisation décrivent la conversion délicate du conflit du conflit en coopération, la mobilisation des ressources et la coordination des efforts qui facilitent la survie simultanée d’une organisation et de ses membres. »] - d’un autre côté la firme est considérée comme lieu de gestion des conflits et des intérêts de ces mêmes agents et la conception de la firme institution va alors au delà dans deux directions complémentaires : par la prise en considération des dimensions sociales (comme expression du système légal et juridique dans laquelle est elle est insérée et qui pose les limites de son activité), et par la recherche d’une mise en perspective historique des formes organisationnelles de leur métamorphoses et de leur processus d’évolution. Une telle conception trouve ses racines chez les institutionnalistes américains (Weblen, Commons, Berle, Means…).
Cette théorie est élaborée, depuis les années 1970, par O.E. Williamson professeur à la Law School de l’université de Berkeley. Né en 1932, il a obtenu en 1963 son PHD à l’université Carnegie Mellon ; H. A. Simon a été son professeur. Seront examinés les points suivants : les fondements originels de la théorie, l’architecture du corpus de l’ECT, l’Analyse des coûts de transaction et enfin la portée de cette théorie.
Deux économistes anglais ont préparé le questionnement qui conduira O. E. Williamson à l’élaboration de l’ECT. D. H. Robertson (1890-1963) a été professeur à Cambridge, il a soulevé la question de l’existence des firmes : « Pourquoi ces flots de pouvoir conscient émergent-ils dans l’océan de la coopération inconsciente ? ». R. H. Coase (1910) a enseigné à l’université de Liverpool et à la London School of Economics ; il a émigré aux U.S.A. en 1951, enseigné dans différentes universités américaines ; il est depuis 1966 professeur à la Law School de l’université de Chicago. Il a poursuivi la réflexion initiale de Robertson en distinguant deux formes alternatives de coordination économique : - sur les marchés la coopération est réalisée de façon inconsciente par le système des prix, - à l’intérieur de la firme la coopération est réalisée de façon consciente par l’autorité de l’entrepreneur. Coase démontre aussi que la coordination par les prix entraîne des coûts.
O. E. Williamson s’appuie sur le raisonnement de Coase en intégrant cinq autres sources :
Son corpus se complète de trois hypothèses sur le comportement des agents : H1 Le comportement en situation de rationalité limitée implique l’incomplétude des contrats H2 La rationalité procédurale implique la recherche par adaptabilité de l’efficience, enfin H3 Le comportement des agents est vu comme étant essentiellement opportuniste : ils recherchent leur intérêt personnel à travers notamment la manipulation de l’information. L’opportunisme se manifeste aussi bien avant la signature du contrat (pré contractuel) qu’après la signature du contrat (post contractuel). L’opportunisme pré contractuel se manifeste :
L’opportunisme post contractuel concerne deux phénomènes :
K. J. Arrow a donné une définition des coûts de transaction : ce sont « les coûts de fonctionnement du système économique ».
En croisant degré de spécificité de l’actif et fréquence de la transaction on peut distinguer 4 cas :
Il se focalise sur deux points : les effets des TIC et notamment d’Internet et la sécurisation des transactions.
D.C. North (économiste institutionnaliste) a signalé que la quasi perfection d’une concurrence est liée à l’établissement d’un système complexe de règles. Il a conduit des recherches sur l’évolution de la part du secteur transactionnel (assurance, finance, secteur immobilier, commerce de gros et de détail) par rapport au PNB : elle est passée de 18 % à 41 % entre 1870 et 1970.
Ces recherches ont réussi à expliquer l’intégration verticale par les facteurs suivants :
Ce sont deux facteurs identifiés par l’ECT comme étant susceptibles de d’influer sur les coûts de transaction. Ces résultats semblent donc corroborer l’ECT.
Tout d’abord le comportement opportuniste est surestimé dans l’ECT ; les comportements managériaux sont plus variés et ne se limitent pas au seul opportunisme. La confiance est ainsi apparue comme une des conditions du bon fonctionnement des entreprises en réseau. Ensuite, privilégier le comportement opportuniste revient à avoir une conception régressive de l’être humain et des managers. De plus l’étude empirique de la déviance ne semble pas évidente à réaliser. Enfin et surtout l’ECT admet implicitement que comportement et attitude opportuniste correspondent au même concept. Or il a été démontré en psychologie que cela n’était pas vrai, même si il existe une relation positive entre les deux concepts. Dans l’ECT il n’y a pas de distinction entre l’attitude (opportuniste) qui est une inclinaison et l’opportunisme qui est un comportement. En fait le modèle d’un comportement opportuniste est beaucoup plus complexe que l’hypothèse simpliste et trop radicale de l’ECT.
![]() Ce modèle suggère donc une relation plus complexe entre le contrôle hiérarchique et le comportement opportuniste matérialisé par deux effets dont les forces sont opposées. Les mécanismes de contrôle
Une autre conséquence de la focalisation sur l’opportunisme est l’augmentation des coûts de coordination qui affaiblirait la compétitivité des organisations qui devraient alors succomber au profit du marché. En quoi résiderait alors la supériorité des hiérarchies par rapport au marché ? Aussi les critiques de l’ECT en viennent-elles à considérer que ce ne sont pas les organisations qui supplantent le marché quand celui-ci est défaillant. Les organisations sont en fait supérieures au marché, ce dernier commence quand les organisations échouent. En effet la logique institutionnelle des organisations [c'est-à-dire l’adaptation intentionnelle vers un but commun partagé par les membres de l’organisation] leur permet de supplanter l’adaptation autonome du marché pour trois raisons :
L’avantage des firmes par rapport au marché ne consisterait pas à venir à bout de pathologies humaines à travers la hiérarchie, mais à canaliser les capacités humaines vers l’initiative. Les organisations échouent quand elles se révèlent incapables de créer le contexte social (confiance et engagement) nécessaire à la coopération. C’est par conséquent le but commun qui constitue la source ultime de l’avantage organisationnel sur le marché : le marché serait le début de la défaillance des organisations. |